Boy Wonder
Une programmation de Sibylle de Laurens avec Robert Aldrich, James Robert Baker, Jonathan Caouette, Doris Day, Todd Haynes, Rock Hudson, Joseph H. Lewis, Brad Pitt, Mark Rappaport, Douglas Sirk, John Wayne et Charlotte Szlovak, entre autres.
Ouverture le mardi 12 octobre à 18h with films & suprises
James Robert Baker (1947-1997), réalise ses premiers films à UCLA (Université de Californie à Los Angeles). Il se fait remarquer au Gay Film Festival (aujourd’hui Frameline Film Festival) en 1978 grâce à Mouse Klub Konfidential, un court-métrage racontant l’histoire d’un enfant star du Mickey Mouse Club devenu une icône du bondage, sur fond de magouille financière entre un groupe de nazis et Walt Disney. Encore étudiant, il gagne le Samuel Goldwyn Writing Award. À sa sortie de l’école, il devient scénariste et se joint au début des années quatre-vingt à un groupe composé de vidéastes, d’acteurs et d’artistes pour créer EZTV, un centre de production et de diffusion de vidéo indépendant situé à West Hollywood. C’est dans ce cadre qu’il réalise son dernier film, véritable succès VHS, Blonde Death (1984). L’année suivante, il publie son premier roman, Adrenaline, qui le fait connaître du lectorat gay et lesbien. L’écriture de romans le pousse à abandonner son travail à Hollywood qu’il quitte non sans amertume. Fuel Injected Dreams (1986) et Boy Wonder (1988) élargiront son lectorat. Tim and Pete (1993) ancre à nouveau son œuvre dans la littérature gay. L’incompréhension du grand public face à sa critique de la gestion de la crise du sida par l’administration de Ronald Reagan et son humour noir grinçant lui ferment de nombreuses portes. En 1996 il publie sur son site internet Right Wing qui sera son dernier roman. James Robert Baker se suicide en 1997. À partir des manuscrits qu’il a laissés, son dernier compagnon fait publier deux romans posthumes :Testosterone (2000) et Anarchy (2002).
Constamment ancrées dans le paysage californien, les aventures trépidantes imaginées par James Robert Baker poussent les héros à traverser Los Angeles en Porsche à la vitesse de l’éclair et les contraints à se cacher dans les canyons surplombants les limites de la ville. Marginaux, paumés ou raides emballés dans le show-business, les personnages sont bringuebalés par l’auteur dans des scénarios rocambolesques et grotesques, inspirés par une critique au vitriol de la morale middle-class. L’amertume de l’auteur et son humour acide se retournent pourtant souvent en un quart de seconde pour donner à voir une sensibilité et un sens du drame dans sa manifestation la plus hollywoodienne. Si l’homophobie et la bigoterie de l’Amérique des années Reagan le révulse, sans résistance, il se laisse émouvoir par les objets du panthéon de la consommation de masse : une bouteille de cream soda, une comédie de Doris Day, un jus d’orange en poudre. Tour à tour pièces maîtresse de l’intrigue, repères rassurants ou réceptacles du drame, la tendresse avec laquelle il épouse la culture populaire provoque des twists à la sentimentalité déchirante.
Dans Boy Wonder, c’est Hollywood qui trinque. Que peut donner un roman écrit par un scénariste aux ambitions contrariées et évoluant au sein d’une scène de vidéastes alternatifs à West Hollywood ? Comment articule-t-il une critique viscérale de l’industrie du cinéma et une cinéphilie à toute épreuve ? Que donne la culture populaire et les blockbusters américains passés au crible d’un regard acerbe aiguisé dans le contexte contreculture gay des années quatre-vingt ? Comment se repérer dans ce référentiel mutant ? Si certaines pistes de réponses ont pu être trouvées dans le travail de traduction, la programmation tente d’exposer celles-ci à travers une sélection de films qui reprennent des motifs du roman et qui s’autorise à son tour un cocktail de mythologies américaines on the rock, servi dans un verre givré de sel.